Le REH au service de la transition agroécologique vers des pratiques productrices d’une eau de qualité vis-à-vis du nitrate

Marine Gratecap

Résumé

Dans le cadre de la mise en demeure de l’État par la Commission Européenne en 2020, concernant des « dépassements chroniques » des seuils autorisés de nitrate dans les eaux destinées à la consommation humaine, les démarches territoriales de gestion de l’azote dans un objectif de résultats sur la qualité de l’eau sont amenées à se développer.

Dans ce contexte, le présent article a pour objectif de présenter un exemple de construction et de mise en œuvre d’une telle démarche sur une Aire d’Alimentation de Captage prioritaire État de 2011 à 2021.

La méthodologie de construction et d’animation utilisée repose sur la démarche de gestion dynamique du projet d’une AAC à enjeu « nitrate », présenté dans le guide de Ferrané et al. (2020).

Cet article présente dans un premier chapitre la logique et les étapes de construction du projet de territoire permettant de définir l’objectif de reliquat entrée hiver (REH) à atteindre dans les champs pour produire de l’eau de qualité vis-à-vis du nitrate au captage. Les chapitres 2 et 3 présentent respectivement les outils mis en place (réseau REH et observatoire des champs à l’automne) et les actions d’animation et d’accompagnement des agriculteurs dans une logique d’amélioration continue des pratiques.

Au travers de ces trois volets, cet article souligne les avantages d’une telle démarche du point de vue de la mobilisation des agriculteurs, mais aussi la posture d’animation et les moyens requis pour le porteur du projet.

Introduction

La construction et l’animation d’un projet de territoire s’inscrit sur le temps long et mobilise de nombreux acteurs et compétences clés. Pour les collectivités, les démarches « captages » représentent des moyens engagés importants, en prestations extérieures (études, partenariats, conventionnements…) et en ressource interne, alors que les résultats obtenus tant sur la qualité de l’eau que sur la mobilisation des agriculteurs ne sont pas toujours au rendez-vous.

Le présent article illustre un exemple de construction et de mise en œuvre d’un projet de territoire basé sur une logique de résultats sur la qualité d’eau (Ferrané et al., 2020). Cet article s’attache à montrer dans quelles mesures cette approche originale a permis de mobiliser positivement les agriculteurs autour d’un enjeu environnemental.

Le retour d’expérience relaté dans l’article couvre la période allant de 2011 à 2021 et n’engage que son auteur et non la collectivité concernée. La chronologie présentée ci-dessous (figure 1) illustre les différentes étapes du projet décrites dans les chapitres qui composent cet article.

 

Figure 1. Chronologie des étapes de construction et de mise en œuvre du projet de territoire basé sur un objectif de résultat.
Les drapeaux identifient les temps de validation des objectifs. Les flèches représentent la logique d’amélioration continue permise par l’accompagnement technique proposé aux agriculteurs dans une logique de résultat.
Les cadres sous la frise représentent les différents outils techniques (en bleu et vert, le bleu représentant des outils mutualisés avec d’autres territoires et le vert des outils dédiés au territoire) et financiers (en gris) mobilisés pour la construction et le suivi du projet de territoire.
Les acteurs clés ayant permis de financer et de construire les outils sont également présentés sur cette figure. L’Agence de l’Eau Seine Normandie a participé au financement de tous les outils mobilisés et de l’animation du projet.

La première partie de l’article présente les étapes et les acteurs clés de la construction du projet de territoire et son caractère déterminant dans l’adhésion des agriculteurs.

La deuxième partie s’attache à décrire les outils d’animation mises en œuvre au service d’un accompagnement des agriculteurs dans une logique de résultats : le réseau de REH et l’observatoire des champs à l’automne pour évaluer la biomasse et l’azote absorbé.

La troisième partie présente les moments clés de l’accompagnement technique au travers de temps individuels et collectifs et l’accompagnement financier dans une logique de résultats, permettant de mettre en avant l’impact de cet accompagnement sur la mobilisation des agriculteurs autour d’un enjeu environnemental.

La construction du projet de territoire

Un temps de transfert de l’eau vers la nappe important qui crée une déconnexion entre les actions entreprises par les agriculteurs et la qualité de l’eau observée à court terme.

Le captage concerné par ce projet de territoire est prioritaire au titre du Grenelle de l’environnement : la concentration en nitrate est en croissance depuis les années 60 et frôle aujourd’hui les 50 mg.L-1.

Le captage exploite la nappe de la craie. Le transfert de l’eau sur ce territoire se fait majoritairement de façon verticale par effet piston de façon homogène (profondeur de sol et de sous-sol homogène).

Compte tenu de la profondeur de la nappe (75 m sous la surface du sol), les effets de modifications de pratiques ne seront visibles qu’à long terme (l’eau met environ 30 ans pour percoler de la surface jusqu’à la nappe). Ceci engendre une déconnexion entre les actions mises en œuvre par les agriculteurs à l’instant t et la qualité de l’eau observée.

Cette déconnexion, observable de façon récurrente sur les eaux souterraines, est souvent identifiée comme une source de démotivation des agriculteurs. En effet, certains mettent en avant les pratiques passées pour expliquer la qualité de l’eau actuelle et « parient » sur le fait que les améliorations des pratiques actuelles (optimisation de la fertilisation via le bilan azoté/prévisionnel de fumure notamment) se verront dans plusieurs années.  Cela engendre, pour l’agriculteur, une incertitude sur l’efficacité des solutions proposées, solutions qui peuvent avoir des conséquences fortes sur le système d’exploitation et son équilibre économique.

Description du territoire concerné

Situé à proximité du port de Rouen, le paysage de l’aire d’alimentation de captage (AAC) est principalement composé de grandes cultures et cultures industrielles intensives.

La surface hydrogéologique est de 6300 ha dont les surfaces agricoles recouvrent 86 % du territoire. Les sols exploités sont à 80 % de type limon profond (> 1 m de limon). Les 20 % restants sont des sols superficiels et caillouteux (60 cm de profondeur).

Ce contexte explique une faible hétérogénéité des systèmes de culture en place et des rendements (80 à 100 qx.ha-1 pour le blé (Triticum aestivum)). Ces systèmes de cultures sont essentiellement des céréales, oléaprotéagineux et cultures industrielles telles que la betterave (Beta vulgaris), le lin (Linum usitatissimum) et la pomme de terre (Solanum tuberosum) (figure 2).

 

Figure 2. Registre Parcellaire Graphique de l’AAC en 2019 (Source : aires-captages.fr)

Cent vingt cinq exploitations ayant au moins une parcelle sur le territoire sont concernées par la démarche AAC. Soixante d’entre elles couvrent 80 % de la superficie agricole utile (SAU) de l’AAC.  La part et l’importance de la SAU d’une exploitation dans l’AAC est un des critères utilisés pour cibler les exploitations à mobiliser dans le cadre de l’animation.

Entre 2011 et 2021, l’animation de ce territoire était réalisée par un équivalent temps plein. Cette situation, au regard du nombre d’exploitants concernés était plutôt confortable car elle octroyait suffisamment de temps pour être au contact des agriculteurs et présent sur le terrain. Ce facteur est la première pierre à la construction d’un projet concerté, puisqu’il permet de créer une relation de confiance entre la collectivité et les agriculteurs.

La modélisation de la lixiviation du nitrate pour construire un objectif de résultat

Un programme d’action a été co-construit.  À l’issue de cette phase, le comité de pilotage (COPIL) de l’AAC a qualifié ce programme de décevant[1] car il ne permettait pas de répondre aux questions suivantes[2]:

  • Est-ce suffisant pour améliorer la qualité de l’eau ?
  • Quels objectifs ?
  • Quels indicateurs ?
  • Quelles mise en œuvre et participation ?

Le « Guide pour une gestion dynamique du projet d’une AAC à enjeu « nitrate » » (Ferrané et al., 2020) propose des étapes de construction d’un projet local qui permettent de répondre à ces interrogations (figure 3).

 

Figure 3. Logique de construction d’un projet local (Ferrané et al., 2020)

Ainsi, sur cette AAC, le COPIL a acté en 2014 que l’objectif de qualité d’eau au captage était de passer en dessous du seuil de vigilance du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), c’est-à-dire en dessous de 37,5 mg.L-1[3].

La question des pertes en azote à ne pas dépasser sous les champs n’a pas été abordée directement puisqu’elles dépendent du pourcentage d’azote lixivié qui dépend de l’épaisseur de la lame drainante, c’est-à-dire que la quantité d’eau qui est drainée vers la nappe tous les ans (Burns, 1974). Il a donc été décidé de se concentrer spécifiquement sur la question de la quantité d’azote à ne pas dépasser dans le sol des champs au début du drainage hivernal.  Cette quantité est fixée par modélisation de la lixiviation du nitrate grâce au Nitrascope©.

Les données d’entrée de l’outil (Paille et al., 2011), issues de l’étude hydrogéologique et de la connaissance agricole du territoire par les agriculteurs et la Chambre d’agriculture, ont permis de reconstruire la courbe d’évolution de la concentration en nitrate mesurée depuis les années 60. Le calage de ce modèle s’est ainsi avéré suffisamment satisfaisant pour pouvoir l’utiliser en prospective sur des scenarii d’évolution des pressions (figure 4).

 

Figure 4. Schéma du fonctionnement et des sorties de l’outil Nitrascope (Extrait d’une présentation de Gratecap M. au PollDiff’Eau 2016 « Comment construire un plan d’action efficace et le mettre en œuvre ? » ), https://aires-captages.fr/sites/default/files/atelier-3b-gratecap.pdf

Basées sur l’objectif d’une concentration en nitrate de l’eau inférieure ou égale à 37,5 mg.L-1, des simulations ont permis de construire deux scenarii pour atteindre cet objectif dans les situations les plus défavorables pour la recharge (des lames d’eau générant le plus de perte de nitrate) :

  • remettre 750 ha d’herbe sur un plateau agricole productif orienté grandes cultures ou
  • plafonner le REH à 60 kg Nmin.ha-1 à l’échelle de l’AAC.

Ces deux scenarii ont été présentés aux agriculteurs de l’AAC lors d’une réunion.  Compte tenu des systèmes agricoles du territoire qui ne permettaient pas de valoriser de l’herbe, les agriculteurs ont retenu le scénario REH.

Afin d’atteindre l’objectif fixé à moyen terme dans la nappe, le REH moyen des champs de l’AAC ne doit pas dépasser, chaque année, 60 kg Nmin.ha-1.

Successions de culture et REH

L’analyse de la contribution des successions de culture à l’atteinte de l’objectif de REH à l’échelle de l’AAC permet de prioriser les actions à mettre en œuvre par les agriculteurs et les moyens de l’animation.

Une fois l’objectif de territoire identifié, comment passer d’un objectif de REH à l’échelle de l’AAC, à un objectif à l’échelle du champ cultivé ?

La réponse aurait pu être que l’objectif à l’échelle de l’AAC correspond à l’objectif à atteindre sur chacune des parcelles cultivées (comme sur l’AAC de Brienon)[4], ou à l’échelle de l’exploitation/du système de culture (comme sur les AAC d’Eau de Paris).

Mais les agriculteurs, forts de leurs connaissances partagées via l’étude de modélisation et des premiers REH mesurés sur le territoire (cf 2ème partie) en parallèle de l’étude de modélisation, ont identifié que les successions de culture n’étaient pas toutes égales face à l’atteinte de ce résultat :

  • existence d’effets précédents ayant une incidence importante sur la valeur du REH : les légumineuses par exemple (Guinet et al., 2019) mais surtout le lin, culture emblématique de la région et très rémunératrice, qui couvre presque 10 % de la SAU sur le territoire ;
  • la couverture des sols comme levier agronomique mobilisable pour atteindre le REH objectif, plus ou moins simple à mettre en œuvre selon les successions de culture.

La logique qui sous-tend l’analyse de la contribution est de maximiser l’impact des éventuels changements envisagés par les agriculteurs pour atteindre les objectifs de qualité d’eau, en priorisant certaines situations agronomiques au regard du levier principal identifié par les agriculteurs : la couverture des sols.

Plusieurs autres voies pour atteindre l’objectif de REH sur l’AAC auraient pu être envisagées, comme le changement d’assolement, une réflexion sur la gestion de la fertilisation à l’échelle du système de culture… Cette question de la fertilisation n’était cependant pas un sujet pour les agriculteurs puisqu’ils disent respecter la règlementation de la Directive Nitrates.

Des scenarii d’atteinte de l’objectif REH à l’échelle de l’AAC ont donc été modélisés via l’analyse de la contribution des successions de culture et présentés aux agriculteurs lors d’un atelier de travail.

La figure 5 présente le scénario retenu par les agriculteurs. Ce scénario comprend les hypothèses suivantes :

  • pas d’évolution de l’assolement pour garantir des surfaces constantes pour toutes les successions existantes ;
  • des objectif de REH à atteindre plus ambitieux que l’objectif du territoire sur les trois successions qui couvrent la plus grande surface de l’AAC, permettant d’atteindre l’objectif de 60 kg Nmin.ha-1 à l’échelle de l’AAC ;
  • les objectifs revus à la baisse de REH proposés sont en phase avec les enseignements des expérimentations de couverture de sol menées par la Chambre d’Agriculture et les premiers résultats de REH.

Les agriculteurs ont choisi de focaliser le travail sur la couverture des sols à l’interculture sur trois successions prioritaires :

  • après récolte de colza ;
  • entre deux céréales ;
  • avant une culture de printemps.

 

Figure 5. État initial calculé sur la moyenne de quatre années de prélèvement (haut) et scénario proposé pour atteindre un REH moyen de 60 kg Nmin.ha-1 (bas). (Source : https://agronomie.asso.fr/aes-9-1-12)

L’analyse à froid de cette étape de construction du projet de territoire permet de pointer les avantages et les inconvénients à prioriser le travail sur trois successions de culture :

  • le temps d’animation dédié à la construction de cette étape du projet a permis aux agriculteurs d’être force de proposition sur le levier à mobiliser (la couverture des sols) et de choisir les objectifs intermédiaires à atteindre sur ces trois successions de cultures parmi les différents scenarii proposés. Chaque agriculteur présent a pu s’approprier et intégrer ces objectifs dans sa logique d’exploitation. Ces objectifs sont devenus des objectifs collectifs ET individuels ;
  • du point de vue de l’animation, cette priorisation des successions prioritaires sur lesquelles travailler oriente également les moyens à mettre en œuvre par l’animation (réseau REH, observatoire des pratiques et actions d’accompagnement) ;
  • le volet négatif à ce stade est d’avoir mis de côté le travail à l’échelle du système de culture sur la gestion de la fertilisation et la rotation. Ce travail reste néanmoins possible grâce à la mise en place de l’observatoire des champs à l’automne (cf chapitre II.2).

Les outils d’animation au service de l’accompagnement des agriculteurs dans une logique de résultats

Construction d’un réseau REH dédié

En parallèle de l’étude de modélisation, des REH ont été mesurés sur l’AAC. Ce réseau de REH, initialement conçu pour de l’acquisition de données, s’est transformé en véritable outil d’animation.

Sous l’impulsion de l’Agence de l’eau, le Département a souhaité s’impliquer sur les territoires des AAC prioritaires. Un réseau de suivi des REH sur toutes les AAC ayant des problématiques nitrate a été mis en place dès 2013 dans le département.

Le protocole de prélèvement

Ce protocole a été construit avec la Chambre d’Agriculture.

Le prélèvement ici n’a pas vocation à être significatif de la parcelle entière. L’objectif est de choisir un point « représentatif » et de le garder dans le temps pour de futurs prélèvements. La technique de prélèvement utilisée est le prélèvement en cercle : un point GPS et 20 carottes prélevées autour d’un cercle. Chaque couche est prélevée séparément.

Pour valider une couche, 12 carottes minimum sont nécessaires. A défaut, la couche n’est pas prise en compte.

Le type de sol de la parcelle est indiqué par l’agriculteur.

Sur un territoire donné, tous les REH sont mesurés :

  • au moment de la recharge de la nappe, ou au moins au plus proche en amont de cette date si la température est inférieure à 10 °C ;
  • dans un laps de temps d’une semaine pour limiter l’effet « date de prélèvement ».

Le REH correspond à la somme de l’azote nitrique sur la totalité des couches prélevées et la somme de l’azote ammoniacal de première couche (0-30 cm) (définition du Groupement Régional d’Expertise Nitrates (GREN) de Normandie). Compte tenu des types de sol rencontrés, 80 % des échantillons ont été prélevés jusqu’à 90 cm (trois couches) et 20 % jusqu’à 60 cm (deux couches).

Sur chacune des AAC concernées, la personne en charge de l’animation avait pour mission de :

  1. engager des exploitations dans le suivi en choisissant avec l’agriculteur les parcelles et les points de prélèvements et
  2. faire un retour individuel des résultats à chaque agriculteur participant.

Au début, les agriculteurs n’étaient pas familiers avec les REH. Afin de les motiver à participer, la mesure d’un Reliquat en Sortie d’Hiver (RSH) a été ajoutée à celle du REH. A chaque point de prélèvement choisi, deux mesures (un REH et un RSH) ont donc été réalisées.

La construction de l’échantillon des parcelles à prélever devait respecter les critères suivants :

  • un REH par 50 ha ;
  • les cas-types (aussi appelés situations), c’est-à-dire les couples précédents-suivants, devaient avoir au moins 10 REH pour pouvoir calculer des moyennes/médianes « correctes » ;
  • des parcelles fixes, c’est-à-dire les parcelles sur lesquelles un REH est mesuré tous les ans, devaient être sélectionnées, à hauteur de 40 % dans l’échantillon de chaque AAC. L’objectif est de suivre la valeur à l’échelle d’une rotation afin de limiter les facteurs de variabilité constatés d’une parcelle à une autre, voire au sein d’une même parcelle.

La restitution des REH auprès de l’agriculteur était également l’occasion de collecter des informations sur les pratiques agricoles de chaque agriculteur, permettant in fine, d’analyser à l’échelle du département, les facteurs de variabilité explicatifs et extraire des tendances de « bonnes pratiques » pour conseiller les agriculteurs.

Les données récoltées étaient relatives :

  • à la fertilisation azotée de la culture précédente (permettant de réaliser un bilan azoté) ;
  • à la gestion de l’interculture (travail du sol, date de semis d’un couvert, type et composition du couvert, date et type de destruction) ;
  • à la préparation de sol pour le semis de la culture suivante.

De plus, toutes les données permettant de réaliser un plan prévisionnel de fumure associé aux RSH étaient collectées à cette occasion.

Au cours de la construction du projet de territoire avec les agriculteurs, il est apparu que l’objectif initial de compiler le REH avec les pratiques des agriculteurs n’était pas adapté à l’objectif d’animation d’une AAC dans un objectif de résultat. En effet, un temps important était consacré par l’animation pour collecter les données (plus ou moins précises, fiables) au détriment d’un échange technique avec l’agriculteur[5].

Cependant, mesurer des REH dans les parcelles s’est avéré pertinent pour accompagner les agriculteurs à améliorer leurs pratiques. En effet, l’idée n’était plus de récolter des données sur leur itinéraire mais de permettre à l’agriculteur d’analyser son propre résultat en identifiant lui-même les facteurs explicatifs. Un histogramme présentant, par succession de culture, les résultats des REH et de l’azote absorbé par le couvert ou la culture au moment de l’interculture, a été mis en place comme outil d’animation, sur les conseils de l’INRAE et du retour d’expérience de l’AAC de Brienon (cf « Zoom sur le déroulé de la restitution individuelle des résultats »).

Un observatoire des parcelles s’est donc avéré nécessaire dans le but d’accompagner l’agriculteur à analyser sa valeur de REH et à s’améliorer (cf chapitre « Observatoire des pratiques »).

Ce changement d’objectif (entre « acquisition de données » et « la mesure du REH comme outil d’animation ») a eu les conséquences suivantes :

  • le nombre de REH a augmenté (passe de 100 à 150 REH mesurés), permettant ainsi de couvrir plus de situations ; considérant que la situation est devenue le triptyque « précédent-interculture-suivant » et non plus seulement la succession de culture. Cette augmentation du nombre de REH et du nombre de situations observées va de pair avec une augmentation du nombre d’exploitations engagées dans le projet ;
  • le choix des points de prélèvement est désormais fonction de la succession de culture, mais aussi de l’état des champs à l’interculture. Certaines parcelles sont donc prélevées suite à des observations en début d’automne, jugeant que la situation observée était intéressante à mesurer. La majorité des points de prélèvements restent décidés avec l’agriculteur en rendez-vous individuel au printemps.

L’observatoire des pratiques pour interpréter le REH

Les agriculteurs ont choisi de travailler sur la couverture du sol à l’automne. Les indicateurs ont été créés et les objectifs associés sont inscrits dans le tableau de bord[6]. Un observatoire des champs à l’automne a donc été mis en place par la collectivité.

Observer les champs de l’été à l’automne permet d’acquérir une information cruciale pour éclairer la valeur du REH mesuré donc d’accompagner l’agriculteur dans une logique d’amélioration continue.

Parmi ces observations de l’état des champs, la pesée de la biomasse permet d’estimer la quantité d’azote absorbé par la CIPAN, via l’outil MERCI – Méthodes d’Estimation & Restitutions par les Cultures Intermédiaires[7].

La quantification de l’azote absorbé est indispensable pour l’interprétation avec l’agriculteur de la valeur du REH (cf chapitre III.1). C’est pourquoi, toutes les parcelles où des mesures de REH sont effectuées font aussi l’objet d’une pesée ou d’une estimation de la biomasse à l’automne (photo 1) .

 

Photo 1.  Pesée de biomasse dans un champ couvert par une interculture. Le cadre d’1/4 m² permet de localiser la placette de prélèvement.

Cette observation est aussi très importante pour déterminer la valeur du REH à l’échelle de l’AAC, indicateur phare pour illustrer l’efficacité des actions menées sur le territoire pour la qualité d’eau (cf zoom sur le calcul du REH du territoire).

Zoom sur le calcul du REH à l’échelle de l’AAC

Tous les ans, les REH combinés aux pesées de biomasse et aux observations satellites permettent d’extrapoler les données REH sur les parcelles qui n’ont pas été échantillonnées.

En effet, grâce aux observations dans les champs et à la connaissance des pratiques des agriculteurs sur le territoire, des cas-types (ou situations) définies comme un triplet « précédent – interculture – suivant » sont construits. Chaque parcelle de l’AAC peut donc être associée à un cas type et se voir affecter une valeur moyenne du REH mesurée pour le cas-type de la même situation.

Le tableau 1 présente la forme du tableau permettant de compiler les résultats pour une campagne donnée.

Cette analyse pourrait être encore plus finement réalisée en ajoutant un facteur fertilisation[8]  qui ferait référence à la notion d’azote en jeu des parcelles (c’est-à-dire le pool d’azote potentiellement minéralisable présent dans le sol, issu de la gestion de l’azote sur le temps long et le temps de la rotation).

Sur le territoire, l’ajout de la variable fertilisation au travers de l’apport de matière organique ne permet pas de calculer des moyennes de REH significativement différentes. Cette dimension est plutôt abordée en individuel et ponctuellement sur des parcelles qui montrent des quantités d’azote en jeu plus importante que la « moyenne ».

 

Tableau 1. Exemple de présentation des résultats de la campagne, compilant les résultats de REH et les résultats de l’observation des champs à l’automne et l’évaluation de la biomasse.

L’accompagnement des agriculteurs dans une logique de résultats

Des actions d’animation ont été mises en place en parallèle, mêlant des moments collectifs (en salle ou au champ) et des moments individuels (figure 6) dans une logique d’amélioration continue des pratiques d’une année à l’autre.

Les temps d’animation permettent de faire « tourner la roue » de l’amélioration continue (Roue de Deming – Deming, 1982) des logiques d’action et pratiques des agriculteurs pour atteindre l’objectif de REH. Le semis des couverts est réalisé par les agriculteurs.

 

Figure 6. Phasage de l’animation dans l’optique d’une boucle d’amélioration continue.

Entre 90 et 110 jours (soit 40 à 50 % d’un temps plein) sont nécessaires pour :

  • accompagner techniquement les 50 agriculteurs engagés (organisation et animation des réunions collectives en salle et au champ et des rendez-vous individuels) ;
  • mettre en place le réseau de suivi des REH tous les ans (choix des parcelles, gestion du marché avec le préleveur et le laboratoire) ;
  • réaliser l’observation des champs à l’automne.

Quelques exemples d’accompagnement technique individuel et collectif

La restitution individuelle

La restitution individuelle des reliquats favorise l’apprentissage de l’agriculteur dans une logique d’amélioration continue.  Lors de ce rendez-vous individuel, l’objectif est de présenter à l’agriculteur ses résultats pour lui permettre de faire une analyse a posteriori de ses pratiques, en se comparant aux autres parcelles de la même succession de cultures.

Les résultats ne sont donc pas présentés sous la forme d’une fiche individuelle, mais sous la forme d’histogrammes (figure 7), présentant l’ensemble des résultats REH et azote absorbé pour chacune des parcelles prélevées et pour toutes les successions représentées.

 

Figure 7. Résultats 2020 des observatoires REH (en bleu) et biomasse/azote absorbé (en vert) de parcelles en interculture longue (céréale suivie d’une culture de printemps).

Sur cet histogramme, la ligne horizontale bleue indique la limite REH à ne pas dépasser pour produire de l’eau de qualité. Si le REH mesuré est inférieur à cette limite, l’agriculteur a produit de l’eau propre sous son champ.

Lors de l’entretien, l’animateur désigne les parcelles de l’agriculteur pour chacune des successions de culture. L’agriculteur est invité à commenter ses résultats à la lumière des autres.

Plusieurs cas de figure se présentent :

  • le REH est en dessous du seuil :
    • avec une quantité d’azote absorbée faible ou nulle
    • avec une forte quantité d’azote absorbée
  • le REH est au-dessus du seuil :
    • avec une quantité d’azote absorbée faible ou nulle
    • avec une forte quantité d’azote absorbée

En fonction des différents cas de figure, un questionnement « large » permet de faire en sorte que l’agriculteur identifie l’explication en fonction du cas de figure dans lequel il se trouve (Tableau 2).

Tableau 2. Questions et explications de l’animateur et Verbatims de l’agriculteur recensés lors de l’entretien individuel de restitution des REH
REH mesuré Azote absorbé par le couvert ou la culture Questions et explication de l’animateur Verbatim d’explication de l’agriculteur
Le REH mesuré est en dessous du seuil La quantité d’azote est élevée L’implantation du couvert a permis d’absorber une grosse partie de l’azote du sol

Comment tu as fait pour obtenir ce résultat ?

« j’ai semé mon couvert juste après la récolte, il a bien levé ! Heureusement parce que je n’ai pas eu le rendement céréale attendu »
La quantité d’azote absorbé est faible Même s’il n’y avait pas eu de couvert, la valeur du REH aurait été en dessous du seuil « je suis déçu, mon couvert avait mal levé ! Je pensais que c’était à cause du sec mais en fait c’est parce qu’il n’y a pas beaucoup d’azote »
Le REH mesuré est au- dessus du seuil La quantité d’azote est élevée Le couvert, bien qu’il fût très bien développé, n’a pas été suffisant pour capter tout l’azote du sol.

Comment on peut expliquer cela ?

As-tu remarqué si cette parcelle était différente des autres ?

« il était beau mon couvert, bien vert encore, je ne l’ai pas encore détruit ! »

« c’est normal j’ai fait un mauvais rendement… »

« c’est un ancien herbage, mais ça fait 30 ans… »

« Cette parcelle carbure plus que les autres, aujourd’hui je la gère comme les autres. Il faudrait peut-être que je fonctionne différemment sur celle-là ? »

La quantité d’azote absorbé est faible Le couvert a absorbé très peu d’azote alors que le REH est élevé.

Comment on peut expliquer cela ?

« je n’ai pas semé car c’était trop sec »

« je voulais semer plus tôt mais je n’ai pas eu le temps »

Ces échanges permettent à l’agriculteur d’analyser son résultat et de le comprendre pour anticiper sur ce qu’il pourrait faire l’année suivante. La fin de l’entretien consiste en la projection des pratiques futures à envisager en fonction des parcelles et des successions considérées.

La restitution collective

Des temps collectifs d’animation créent du lien entre les agriculteurs rassemblés autour d’un même objectif.

Au démarrage du dispositif, des ateliers de co-construction étaient proposés aux agriculteurs, leur permettant de produire collectivement des itinéraires techniques permettant l’atteinte des objectifs fixés via des couverts efficaces (puisque c’est cette voie qu’ils avaient choisi d’explorer).

Le déroulé de ces ateliers suivait le même schéma :

  1. un temps pour rappeler ce qui nous rassemble et présenter le tableau de bord ;
  2. un temps d’apport de connaissance avec souvent la venue d’un « expert » ;
  3. un temps de construction collective avec une consigne.

Ces premiers ateliers ont rassemblé plus d’une trentaine d’agriculteurs, montrant l’intérêt et la curiosité pour le sujet de la qualité d’eau et notamment des couverts, à l’époque où seul l’aspect réglementaire de ces pratiques était mis en avant, au détriment de l’agronomie.

Au fur et à mesure des années, une dizaine d’agriculteurs qui avaient envie d’explorer le sujet de la couverture du sol en interculture se sont regroupés pour explorer des objectifs autres que le piégeage du nitrate :

  • l’amélioration de la structure du sol ;
  • l’augmentation de la teneur en matière organique ;
  • le renforcement de la biodiversité du sol.

Dans ce cadre, un expert de l’agriculture de conservation intervenait tous les ans dans les champs à l’automne, pour observer les sols et conseiller sur les mesures et les pratiques à mettre en œuvre.

Parallèlement, un autre groupe a été formé, rassemblant les agriculteurs présentant des résultats de REH et de biomasse élevés à l’automne, synonymes d’une quantité d’azote en jeu importante dans les champs. Dans ce groupe, un suivi de l’indice de nutrition azotée (INN) (Lebreton, 2019) a été réalisé dans les parcelles de blé pour :

  • piloter au mieux la fertilisation minérale en fonction des besoins du blé et
  • permettre à l’agriculteur de mieux évaluer l’azote apporté par le sol via la minéralisation (Jeuffroy et al., 2019 ; Gratecap, 2019).

Le conseiller DEPHY de la Chambre d’Agriculture est intervenu auprès de ce groupe pour présenter la méthode et proposer des temps d’échanges aux champs.

Ces temps collectifs sont très riches tant par les échanges entre les agriculteurs que par les apports techniques indispensables à l’évolution des pratiques des agriculteurs.

Un couple « animateur – conseiller » est pertinent pour l’équilibre entre le rappel permanent de l’objectif de qualité d’eau et des nouvelles connaissances apportées par le conseiller. Faire appel à plusieurs intervenants permet de diversifier les sources d’information, d’ouvrir les agriculteurs à d’autres points de vue que leur conseiller classique et de rendre autonome les agriculteurs dans leur prise de décision sur la ferme.

Les temps collectifs permettent aussi de maintenir la motivation des agriculteurs, toujours sur le fil entre la technique agronomique et l’objectif de qualité d’eau.

L’animation à l’échelle d’une AAC dans un objectif de résultat a aussi un rôle fédérateur entre les agriculteurs. La logique de résultats, contrairement à la logique des moyens et des « bonnes pratiques » permet de ne pas opposer les systèmes entre eux. La responsabilité est affaire de tous. Cela permet donc des échanges sereins et constructifs entre des agriculteurs qui ne se seraient jamais croisés dans des réseaux « classiques » alors qu’ils sont voisins.

Au-delà de la mobilisation des agriculteurs, un mécanisme d’apprentissage des agriculteurs est à l’œuvre. Tout l’enjeu de ces temps d’animation est de garder la motivation des agriculteurs participants. Ce dispositif d’accompagnement a pu donner des résultats positifs en termes de mobilisation des agriculteurs mais aussi dans l’apprentissage des agriculteurs vers des pratiques permettant de produire de l’eau de qualité dans les champs.

Dans le but de poursuivre cette dynamique, un travail basé sur l’idée de proposer une rémunération en échange de l’atteinte de l’objectif de REH a été mené à partir de 2017.

Le paiement pour services environnementaux

L’atteinte de l’objectif de territoire tous les ans est dépendant de la mobilisation de chacun et doit s’inscrire dans la durée. Pour cela, un paiement pour services environnementaux (PSE) basé sur un objectif de REH a été expérimenté pour répondre aux hypothèses suivantes[9]:

  • est-ce qu’un PSE permettrait de faire adhérer des agriculteurs qui ne participeraient pas au groupe ?
  • est-ce qu’un PSE permettrait de rendre pérennes les changements de pratique entrepris par les agriculteurs ?

Cette expérimentation a été menée dans le cadre du projet INTERREG CPES (Channel Paiement for Ecosystem Services).

Zoom sur le dispositif PSE de l’AAC

Le paiement est composé de trois éléments : un paiement individuel, un bonus collectif et une contrepartie.

Le paiement individuel dépend de l’atteinte de l’objectif de qualité d’eau.

  • Si l’objectif est atteint, l’agriculteur bénéficie d’un paiement proportionnel à la surface de la parcelle engagée. Des montants forfaitaires à l’hectare, correspondant au consentement à recevoir, ont été révélé par un système d’enchère BDM (Becker et al., 1964). La valeur de ce forfait dépend de la succession de culture considérée.
  • S’il n’atteint pas l’objectif, l’agriculteur ne reçoit pas de part individuelle.

Pour chaque parcelle (correspondant à une succession éligible) engagée par l’agriculteur, un REH est mesuré. Si le résultat est supérieur à l’objectif de REH, le coût du prélèvement et de l’analyse du REH est à la charge de l’agriculteur. Il est déduit du montant total qu’il lui sera versé.

Le bonus collectif est attribué à toutes les surfaces engagées, quel que soit le résultat.

Plus la surface engagée par l’ensemble des exploitations volontaires est importante, plus le montant du bonus est élevé (figure 8).

Figure 8. Structure du paiement PSE et sa conditionnalité.

La première année (2019), les exploitations impliquées dans le projet de territoire (50 exploitations) ont signé la convention avec la collectivité pour s’engager dans le PSE. Le PSE a eu un effet sur l’évolution du nombre d’exploitations engagées et donc sur les surfaces (tableau 3).

Tableau 3.  Mobilisation des agriculteurs lors des trois premières années du PSE (Source : https://professionnels.ofb.fr/fr/restitution/replay-webinaire-retour-dexperience-paiements-services-environnementaux-eau-qualite).
2019 2020 2021
Nombre d’exploitations engagées dans le PSE 50 55 61
Surface engagée dans le PSE 3 847 ha 4 273 ha 4 336 ha
Pourcentage de l’AAC engagé en PSE 65 % 72 % 73 %

Il a permis aussi aux agriculteurs déjà engagés dans la gestion dynamique avant la mise en place du PSE, de créer un effet levier important sur des investissements permettant d’améliorer leurs résultats : dès la première année du PSE, 10 exploitations ont investi dans du matériel de semis pour les couverts d’interculture. Ces exploitants avaient en effet identifié les pratiques à mettre en œuvre pour améliorer leurs résultats. L’accompagnement pour l’apprentissage en amont du PSE a permis de légitimer l’intérêt du PSE comme réel levier à la transition et ainsi pérenniser les changements de pratiques.

L’autre enseignement de ces trois premières années de PSE est l’importance du bonus collectif (non dépendant du résultat REH) dans le maintien de la dynamique.

Conclusion

Cette gestion dynamique permet de mobiliser positivement les agriculteurs aux enjeux de la protection de la ressource. En effet, ce processus rend autonome les agriculteurs sur les moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de REH.

Passer d’une obligation de moyen à une obligation de résultat permet de prendre en charge la complexité des variables qui influent sur la valeur du REH mais aussi la diversité des voies pour réussir. On ne parle donc plus de « bonnes pratiques » qui seraient à mettre en œuvre dans toutes les exploitations, quels que soient les systèmes de culture ou d’exploitation mais de pratiques (variables d’une exploitation à l’autre) qui permettent d’atteindre les objectifs REH.

Ce mécanisme d’apprentissage permet à chacun de trouver un pouvoir d’agir pour que sur ses parcelles, les objectifs soient atteints.

Les temps individuels avec chaque agriculteur permettent d’analyser ses pratiques tandis que le temps collectif permet d’ouvrir le champ des possibles et de s’inspirer des pratiques qui fonctionnent chez d’autres pour les tester chez soi.

Ce travail, mêlant des temps individuels et collectifs dans une logique de résultat est un moteur de mobilisation des agriculteurs très important. Les changements de pratiques, bien que parfois peu visibles, sont bien en cours dans les réflexions des agriculteurs qui participent activement aux temps d’animation proposés.

L’animation dans une logique de résultats a aussi un rôle fédérateur très important entre les agriculteurs. Ils deviennent tous acteurs de la production d’une eau de qualité vis-à-vis du nitrate sur leur territoire, quel que soit leur système d’exploitation, quelles que soient leurs pratiques, qu’ils soient « en bio » ou « en production intégrée » ou « en production conventionnelle », qu’ils soient accompagnés par « la Chambre », par leur « Coop » ou par des privés.

Les temps d’animation deviennent des moments au cours desquels des agriculteurs qui sont voisins mais ne se connaissent pas, interagissent voire coopèrent.

La mise en place d’un PSE est pertinente sur un territoire : il vient apporter un plus pour « sauter la première marche » dans les changements qu’ont identifié les agriculteurs. Un PSE n’est pas un projet de territoire mais un outil au service du projet. Le PSE a ainsi permis d’aller chercher de nouveaux agriculteurs.  Mais c’est bien l’accompagnement proposé en parallèle qui rend ces nouveaux agriculteurs acteurs du projet de territoire, en l’occurrence, atteindre les objectifs de qualité d’eau.

Ce témoignage met en exergue des points clés de la réussite d’un projet de territoire, à savoir l’importance :

  • du temps long ;
  • d’une posture d’animation tournée résultats plutôt que « bonnes pratiques » ;
  • de l’acquisition d’un savoir-être et d’un savoir-faire via des formations et la participation à des réseaux d’échange (comme le centre ressource captage) ;
  • d’un écosystème d’acteurs diversifiés et complémentaires pour emmener les agriculteurs dans le projet de territoire.

Un film « LE SENS DE L’EAU » [10] réalisé en 2020 présente de façon accessible ce projet et permet d’entendre le témoignage d’agriculteurs y participant. L’objectif de ce film est de provoquer du débat et des questions sur des sujets d’actualité tels que la réglementation, la transition agroécologique et le financement de cette transition.

Références bibliographiques

Becker G.M., DeGroot M.H., Marschak J., 1964. Utilité de mesure par une méthode séquentielle à réponse unique. Behavioral Sciences, 9 (3), 226–232.

Burns I.G., 1974. A model for predicting the redistribution of salts applied to fallow soils after excess rainfall or evaporation. Journal of Soil Science, 25, 165-178.

Deming W. E., 1982. Quality, Productivity, and Competitive Position, MIT CAES

Lebreton P., 2019. La mise en pratique de la méthode APPI-N : quelles conséquences sur les apprentissages chez les agriculteurs ? Sciences du Vivant [q-bio]. ffdumas-02368610f. https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02368610/document

Ferrané C., Reau R., Prost L., 2020. Qualité de l’eau en aire d’alimentation de captage : gestion dynamique avec la démarche Transit’Eau. Chapitre 18. In : Leenhardt D., Voltz M., Barreteau O. (coord.). L’eau en milieu agricole. Outils et méthodes pour une gestion intégrée et territoriale. France, Versailles : Éditions Quæ, pp 245-252.

Ferrané C., Paravano L., Prost L., Reau R., 2020. Piloter un territoire selon une logique de résultat pour la qualité de l’eau. Guide pour une gestion dynamique du projet d’une AAC à enjeu « nitrate ». INRAE, OFB, 54 p.

Le Gall C., Reau R. et al., 2021. Guide de diagnostic des pertes d’azote dans les systèmes de culture. Projet CASDAR Agro-éco-Syst’N N° 5611. http://www.rmt-fertilisationetenvironnement.org/moodle/course/view.php?id=146

Guinet M., Nicolardot B., Durey V., Revellin C., Lombard F. et al., 2019. Fixation symbiotique de l’azote et effet précédent : toutes les légumineuses à graines se valent-elles ?. Innovations Agronomiques, INRAE, 74, 55-68. ff10.15454/jj5qvvff. ffhal-02158172 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02158172/document

Gratecap M., 2019. Penser la gestion de l’azote autrement : témoignage sur le BAC du Tremblay-Omonville. AES Volume N°9-1. Gestion de le Fertilisation https://agronomie.asso.fr/aes-9-1-12

Jeuffroy M.-H., Ravier C., Lenoir A., Meynard J.-M., 2019. Une nouvelle approche pour le raisonnement de la fertilisation azotée du blé. AES Volume N°9-1. Gestion de le Fertilisation

Paille J., Lemaire B., Oppeneau E. et Rizza J.P., 2011. Nitrascope, un outil de gestion des pollutions des eaux souterraines par les nitrates. 17èmes journées techniques du Comité Français d’Hydrogéologie de l’Association Internationale des Hydrogéologues, 12p

Shogren J. et al., 2001. Auction mechanisms and the measurement of WTP and WTA. Resource and Energy Economics, 23, 97–109.


  1. https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf/cdr/Webinaire2021_PSE_SERPN_CDRCaptages.pdf
  2. https://aires-captages.fr/sites/default/files/atelier-3b-gratecap.pdf
  3. https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf/cdr/Webinaire2021_PSE_SERPN_CDRCaptages.pdf
  4. https://aires-captages.fr/sites/default/files/161115_partage-expe-2_1.reau-paravano.pdf
  5. Sur le volet scientifique, malgré la quantité importante de données collectées depuis 2013, l’analyse statistique n’a pas permis de faire ressortir des « bonnes pratiques » permettant d’atteindre l’objectif de REH, le nombre de facteurs influençant la valeur du résultat étant trop important.
  6. Le tableau de bord n’est pas présenté dans le présent article. Le Guide pour une gestion dynamique du projet d’une AAC à enjeu "nitrate" (Ferrané et al., 2020) le présente p52. L’objectif et les étapes d’élaboration du tableau de bord sont présentés dans le chapitre II.2 du guide.
  7. https://methode-merci.fr/
  8. Guide de diagnostic des pertes d’azote dans les systèmes de culture C. Legal et al., 2021 (https://www.terresinovia.fr/documents/41383/451975/AES2021_Guide_Diagnostic_pertesN_SdC.pdf/3d360993-f3aa-87a9-9795-0f2028d86212?t=1630336101748)
  9. https://prodasteeapi.azurewebsites.net/public/Documents?serverRelativeUrl=/sites/Evenements/Shared %20Documents/4.-GRATECAP.pdf
  10. La bande annonce est disponible : https://vimeo.com/407562560. Le film est disponible sur Vimeo sur demande au réalisateur bcleret@gmail.com

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