section 6 : les organes des sens

Section 6

Les organes des sens

Introduction.

Les perceptions d’odeurs, du goût, des sons (ondes aériennes mécaniques) et de la vision (ondes électromagnétiques dans le spectre visuel) sont reçues au niveau de récepteurs spécialisés et transmises au niveau cortical par différents nerfs crâniens.

La complexité de certains de ces récepteurs et la particularité des voies de transmission justifient de les analyser dans une section spécifique qui regroupe :

  • La muqueuse olfactive et les voies olfactives (NC I)
  • L’œil, ses annexes et les voies visuelles (NC II)
  • L’oreille (externe, moyenne et interne) et les voies auditives ( NC VIII)
  • Les papilles gustatives et les voies de la gustation (NC VII, IX et X)

Muqueuse et voies olfactives.

Les molécules en suspension dans l’air inspiré ou refluant de la cavité orale vers l’oro– puis le naso-pharynx stimulent les terminaisons olfactives. Les récepteurs sont situés au sein la muqueuse respiratoire du toit des fosses nasales pour constituer la muqueuse olfactive. De ces récepteurs, des prolongements axonaux traversent la lame criblée de l’ethmoïde pour faire synapse au sein du bulbe olfactif prolongé par le tractus (bandelette) olfactif (premier nerf crânien) qui se connecte au rhinencéphale (voir section 8-3, figure 8-22) sur un mode homolatéral et sans relais thalamique.

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Figure 8-58

Voies olfactives.

A : Section sagittale montrant la fosse nasale droite : 1 = muqueuse olfactive, 2 = bulbe olfactif, 3 = bandelette olfactive. Les particules en suspension proviennent du flux inspiratoire ( = 4) ou d’un reflux de la cavité buccale via le naso-pharynx ( = 5)

B : Vue 3D oblique antérieure gauche, hémisphère gauche non représenté

C : Vue inférieure montrant les voies olfactives aboutissant au rhinencéphale homolatéral ( = 6)

Œil et voies visuelles.

L’organe de la vision est le globe oculaire (figure 8-59). Les ondes électromagnétiques du spectre visible stimulent deux types de récepteurs : les cônes et les bâtonnets. Ces neurones récepteurs sont issus embryologiquement des cupules optiques, diverticules du diencéphale (voir figures 8-8 et 8-9). La portion réceptrice de ces cupules forme les deux rétines connectées au diencéphale par les deux nerfs optiques (NC II) comportant une artère centrale dont les branches courent sur la surface de la rétine. L’examen du fond du globe oculaire réalisable via un ophtalmoscope renseigne directement sur l’état de la rétine et donc du tissu nerveux, mais également sur l’aspect des vaisseaux qui se trouvent à sa surface.

La rétine tapisse le fond de la sphère que constitue le globe oculaire (diamètre de 2,5 cm) lui-même muni d’une partie antérieure transparente (cornée) alors que le restant de cette sphère (sclère) est opaque. Le globe oculaire logé au sein de l’orbite osseuse correspond à un système optique perfectionné :

  • Diaphragme musculaire lisse (iris) permettant de moduler l’orifice d’entrée de la lumière (diamètre pupillaire adaptable : myosis (petit) ou mydriase (large))
  • Lentille à pouvoir de réfraction adaptable (cristallin)

Le cristallin est fixé de façon radiaire au corps ciliaire par la zonule ciliaire. Lorsque la zonule se relâche, le cristallin, par son élasticité propre, augmente son bombement et ainsi son pouvoir de réfraction (vision de près).

L’œil est divisé par l’iris en une chambre antérieure (liquidienne) et une chambre postérieure (à contenu gélatineux : le corps vitré).

Sur la surface externe de la sclère s’insèrent les muscles oculomoteurs qui permettent les mouvements coordonnés des deux globes oculaires.

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Figure 8-59

Globe oculaire et muscles oculomoteurs.

A : Section sagittale du globe oculaire : 1 = cornée et épithélium cornéen, 2 = ouverture pupillaire, 3 = chambre antérieure, 4 = iris, 5 = corps ciliaire, 6 = zonule de Zin, 7 = cristallin, 8 = sclère, 9 = rétine, 10 = choroïde, 11 = muscle oculomoteur, 12 = vaisseaux centraux de la rétine, 13 = nerf optique, 14 = glande lacrymale, 15 = corps vitré, 16 = tarse, 17 = conjonctive palpébrale, 18 = cil, 19 = conjonctive sclérotique, 20 = muscle orbiculaire des paupières (voir figure 5-93) .

B : Vue supérieure des 2 orbites, globes oculaires et muscles oculomoteurs.

C : Vue supérieure de la base du crâne et position des cônes orbitaires.

La partie antérieure du globe oculaire est recouverte par les paupières supérieures et inférieures formées d’un axe cartilagineux, de muscles striés, de glandes et d’un bord libre dessinant la fente palpébral bordée de cils. La face interne de chaque paupière est tapissée de conjonctive (dite palpébrale) qui se réfléchit sur la sclère (conjonctive dite bulbaire) pour donner ensuite un revêtement transparent et non vascularisé à la surface de la cornée (épithélium cornéen).

Les glandes lacrymales (au sein des paupières) (figure 8-60) déversent continuellement les larmes à la surface du globe oculaire, larmes répandues par le battement palpébral (muscles orbiculaires des paupières). Les larmes sont récupérées dans l’angle interne de la fente palpébral par des conduits cartilagineux aboutissant au niveau du méat inférieur des fosses nasales (canal et sac lacrymal).

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Figure 8-60

Voies lacrymales.

A : Vue de face, 1 = glande lacrymale, 2 = sac lacrymal, 3 = abouchement au niveau du méat inférieur des fosses nasales.

Constitution osseuse de l’orbite :

B : Face : 4 = sphénoïde, 5 = frontal, 6 = lacrymal, 7 = maxillaire, 8 = ethmoïde, 9 = zygomatique

C : Profil droit.

La vision est perçue par le cortex récepteur du lobe occipital organisé sur les berges de la scissure calcarine. Les voies optiques (figure 8-61) font relais au niveau thalamique, avant de rejoindre l’aire corticale occipitale. Des connexions complexes permettent également une série de mouvements réflexes en relation avec la position de la tête ou les informations auditives et l’adaptation du système optique oculaire (diamètre pupillaire). Ces différentes connexions font intervenir les corps géniculés (thalamus) et les tubercules quadrijumeaux (mésencéphale).

Les voies visuelles sont croisées si l’on considère le croisement non pas en terme d’œil (droit ou gauche) mais bien en terme de champ visuel pour chaque œil (champ visuel droit ou gauche, supérieur ou inférieur).

  • Le champ visuel droit correspond à la vision des objets situés à la droite du sujet étudié, dont les images se projettent sur la rétine nasale de l’œil droit et temporale de l’œil gauche.
  • Le champ visuel gauche correspond à la vision des objets situés à la gauche du sujet étudié, dont les images se projettent sur la rétine temporale de l’œil droit et nasale de l’œil gauche.

De même,

  • Le champ visuel inférieur correspond à la vision des objets situés sous le sujet étudié, dont les images se projettent sur la rétine supérieure des deux yeux.
  • Le champ visuel supérieur correspond à la vision des objets situés au dessus du sujet étudié, dont les images se projettent sur la rétine inférieure des deux yeux.

Partant de la rétine, les deux nerfs optiques se dirigent en arrière et médialement pour former sous le IIIème ventricule, le chiasma optique qui permet le croisement des fibres en fonction du champ visuel. Ensuite les bandelettes optiques aboutissent aux corps géniculés latéraux (thalamus) d’où partent les radiations optiques supérieures et inférieures vers le cortex occipital.

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Figure 8-61

Voies visuelles.

A : Vue antéro latérale droite de l’encéphale, hémisphère gauche non représenté, voies optiques 1 = rétine, 2 = nerf optique, 3 = chiasma, 4 = bandelette optique, 5 = corps genouillé latéral et 6 = scissure calcarine (face interne du lobe occipital droit), 7 = radiations optiques

B : Vue supérieure des voies optiques : le champ visuel externe (ici gauche) se projette sur la rétine nasale de l’œil gauche (OG) et la rétine temporale de l’œil droit (OD)

C : Vue latérale des voies optiques : le champ visuel inférieur se projette sur la rétine supérieure

D : Résumé des projections des quadrants du champ visuel, vue identique à A

Oreille et voies auditives.

La perception des sons (onde de pression aérienne) est réalisée grâce à un organe pair localisé au niveau de l’os temporal (voir figure 5-22). L’oreille se compose (figure 8-62) :

  • D’un pavillon, formé de cartilages recouverts de tissu cutané
  • D’un conduit (conduit auditif externe) qui débute au pavillon (méat acoustique externe) et pénètre à l’intérieur de l’os temporal pour se terminer par une membrane, le tympan
  • D’une cavité aérienne (oreille moyenne) logée au sein de l’os temporal, séparée du conduit auditif externe par le tympan, communiquant avec le naso-pharynx par un conduit ostéo-cartilagineux (trompe d’Eustache) et en relation avec la cavité liquidienne de l’oreille interne (fenêtres du vestibule et cochléaire).
  • D’une cavité liquidienne (oreille interne), logée au sein de l’os temporal et contenant l’endo- et la périlymphe, où se situent les neurones récepteurs (columelle – cellules ciliées (sons) et canaux semi-circulaires (mouvements / équilibre)) qui se connecteront au NC VIII.

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Figure 8-62

Oreille externe et moyenne, osselets.

A : Vue latérale de l’os temporal D, 13 = écaille, 12 = rocher, 14 = os tympanique, 15 = branche montante de la mandibule, 16 = cavités aériennes, 17 = oreille interne (cavité liquidienne), plan de section donnant B

B : Oreille externe : pavillon = 1, méat acoustique externe = 3, conduit auditif externe = 4 fermé par le tympan = 2. Oreille moyenne : cavité propre = 5 communiquant via la trompe auditive (d’Eustache) = 6 avec le naso-pharynx = 7 (sous l’os occipital = 11) et contenant la chaîne des osselets = 8. Oreille interne = 9 et nerf VIII, cochléo-vestibulaire, sortant par le méat acoustique interne = 10

C : Chaîne des osselets : marteau (malleus) = 18, enclume (incus) = 19 et étrier (stapes) = 20

Accolée à la face médiale du tympan se trouve la chaîne des osselets : le marteau, l’enclume et l’étrier.

  • Le marteau (malleus) est fixé à la membrane tympanique
  • L’enclume (incus) s’articule avec le marteau et l’étrier
  • L’étrier (stapes) s’articule avec l’étrier et se termine avec sa base emboîtée dans la fenêtre du vestibule

Les vibrations occasionnées par les sons au niveau du tympan sont répercutées par la chaîne des osselets aux liquides de l’oreille interne.

La cavité de l’oreille moyenne communique avec des espaces aériens creusés au sein de la mastoïde.

La cavité liquidienne de l’oreille interne dessine un volume complexe, le labyrinthe osseux rempli de périlymphe et divisé en vestibule, canaux semi-circulaires et cochlée. (figure 8-63) Ce labyrinthe osseux contient le labyrinthe membraneux rempli d’endolymphe et divisé en

  • Labyrinthe vestibulaire (utricule, saccule et conduits semi-circulaires)
  • Labyrinthe cochléaire

Les cellules réceptrices localisées au niveau du labyrinthe vestibulaire (utricule, saccule, canaux semi-circulaires) sont sensibles à la gravité et aux déplacements de l’endolymphe occasionnés par les accélérations linéaires ou angulaires de la tête et donnent un influx afférent par le nerf vestibulaire (rôle dans l’équilibre).

La vibration de la chaîne des osselets transmise par fenêtre vestibulaire (oblitérée par la base de l’étrier et un ligament annulaire) se transmet à la périlymphe et l’endolymphe du labyrinthe cochléaire où les cellules réceptrices sont stimulées en fonction de la fréquence de la vibration et donnent un influx afférent par le nerf cochléaire (rôle dans l’audition).

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Figure 8-63

Oreille interne.

A : Labyrinthe osseux : 1 = vestibule, 2 = cochlée, 3 = fenêtre de la cochlée, 4 = fenêtre du vestibule, 5 = canal semi-circulaire, 6 = nerf vestibulaire, 7 = méat acoustique interne, 8 = nerf cocléaire ( NC VIII = 6 + 8)

B : Labyrinthe membraneux composé du labyrinthe vestibulaire ( utricule = 9 et saccule = 10) et du labyrinthe cochléaire ( périlymphe = 11 et conduit cochléaire rempli d’endolymphe = 12)

C : 13  = accélération dans le plan du canal : mise en mouvement du liquide, 14 = accélération perpendiculaire au plan du canal sans mouvement subséquent du liquide

D : Position des plans des canaux semi-circulaires G et D.

Le nerf vestibulo-cochléaire ou NC VIII, quitte alors la face supérieure du rocher par le méat acoustique interne.

Les voies auditives passent par le tronc cérébral essentiellement de façon hétéro-latérale pour atteindre le colliculus inférieur (mésencéphale) puis corps géniculé médial (relais thalamique) avant de former les radiations auditives pour atteindre l’aire auditive primaire au niveau du cortex temporal (Figure 8-64).

Les voies vestibulaires, complexes, interviennent dans le contrôle de la musculature du tronc (maintien antigravitionnel), les mouvements coordonnés de la tête et des globes oculaires avec un contrôle cérébelleux.

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Figure 8-64

Voies auditives.

A : Vue inférieure de l’encéphale montrant globalement les voies cochléaires (audition)( 1 = NC VIII et 2 = cortex temporal)

B : Vue postéro supérieure du tronc cérébral par transparenceau travers du cervelet, hémisphères non représentés : Voies vestibulaires (vert) connectées au cortex ( = 5), aux noyaux occulomoteurs ( = 6), au cervelet via les pédoncules ( = 8) et aux neurones moteurs spinaux ( = 7). Relais des voies cochléaires via le colliculus inférieur (tubercule quadrijumeaux inf./ mésencéphale) ( = 3) et le corps genouillé médian (thalamus)( = 4)

C : Vue antéro lat gauche de l’encéphale, hémisphère gauche non représenté ; voies cochléaires droites aboutissant au cortex temporal G (= 2)

Papilles gustatives et voies gustatives.

La perception gustative est réalisée par les papilles gustatives que l’on retrouve au niveau de la langue, de la cavité buccale et du gosier. Elles forment les papilles circumvallées, filiformes et fungiformes dont les afférences sont véhiculées par plusieurs nerfs crâniens : NC VII, NC IX et NC X.

Les cinq saveurs (sucré, salé, amer, acide et umami (glutamate)) sont perçues à des endroits distincts .

Après un relais thalamique, la projection des voies gustatives essentiellement ipsilatérale se fait sur le lobe insulaire (figure 8-65).

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Figure 8-65

Voies gustatives.

A : Vue de face de la langue, 1 = alignement des papilles circumvallées dessinant le « V » lingual, 2 = épiglotte, 3 = territoire gustatif du NC IX (glosso-pharyngien), 4 = territoire gustatif du NC VII (facial)

B : Section frontale de l’encéphale suivant le plan matérialisé par la ligne rouge en C, vue de la portion postérieure de la section (flèche noire). 5 = thalamus, 6 = lobe insulaire

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